Je m'accroche à nous cinq
Quand tu deviens parent, ton monde rétrécit jusqu’à former une bulle autour de tes enfants. Vous devenez une famille. Pour les pleurs et pour les rires. Pour le meilleur et pour le pire.
Pendant longtemps, ils ont été mon unique horizon, ou presque. Je le vivais avec bonheur, évidemment. Rien n’est plus fort. Mais c’était aussi ma prison. J’avais un peu comme le syndrome de Stockholm, si tu vois ce que je veux dire.
Je faisais presque tout avec mes enfants ou à cinq, avec chéri. C’était une obligation morale. C’était surtout un fait. J’allais vous écrire que je ne mesurais pas la chance que j’avais mais pendant longtemps, je suis honnête avec vous comme toujours, je ne le considérais pas comme une chance. C’était ma vie, point barre.
Aujourd’hui, les choses ont changé. Beaucoup changé. D’abord parce que mes enfants ont bien grandi. Ils sont en partie autonome et moi, je vis enfin pour moi. Ma bulle s’est agrandie. Ou peut-être ai-je simplement la capacité d’en sortir sans la faire éclater. Et lorsque j’y retourne, le plaisir est plus fort.
Et puis, avec les 18 ans de numéro 1, j’en mesure toute la fragilité. Elle ne demande désormais qu’à sortir de notre bulle. Même si elle s’y sent toujours bien, elle veut naturellement faire sa vie, sans nous. Elle parle de partir… et moi, mon cœur de maman se serre à cette idée.
Alors, je profite de chaque moment passé à cinq. Et même, carrément, j’en crée.
Nous avions prévu de faire un grand voyage tous les cinq. Nous devions aller à l’Île Maurice en décembre 2020… Mais le virus en a décidé autrement.
Je me suis rabattue sur un séjour à Disney (ça aussi, nous avions dit que nous le ferions une fois tous les cinq…) qu’il nous a fallu annuler aussi.
Nous nous sommes rendus à l’évidence : il fallait repousser le voyage. A l’été 2021 ? Chéri me disait qu’on partirait à quatre. Que numéro 1 allait travailler… Mais je ne pouvais m’y résoudre. J’ai négocié ferme. Et nous sommes partis tous les cinq sur les routes du Yucatan. Et j’en ai profité comme jamais. Et j’ai fait des milliers de photos pour avoir autant d’occasions de pleurer plus tard…
Après ce voyage, nous avions convenu que nous ne pourrions pas aller au ski. Sauf que… Notre séjour dans les Alpes en février 2021 avait été sympathique et très différents des autres vacances à la montagne : ski de randonnée, raquettes, balades… Mais pas de ski et une frustration collective.
Et surtout, je me suis dit que cet hiver 2022 allait certainement être le dernier où nous pourrions skier à cinq. Alors j’ai fait germer l’idée dans la tête de mon homme. Et ça a pris !
Tant pis pour les économies, nous sommes partis à Méribel. Tous les cinq. Lui, moi et eux. En vase clos. Et nous avons skié ensemble, joué aux cartes, regardé un film, lovés sous la couette. Ils m'ont régalé. Ils ont rempli mon cœur et ma tête d'instants magiques. Ils ont alimenté mon album mental.
Au-delà de ces grands événements, je ne manque pas de créer des moments en famille : décoration du sapin, un goûter en pleine semaine (merci le Covid), une promenade à Bordeaux, une partie de tarot, une sortie en skate…
Ils ne sont ni quotidiens ni même hebdomadaires et même pas extraordinaires, mais avec des adolescents de 16 et 18 ans, c’est déjà une victoire qu’ils acceptent de passer du temps avec nous. Et je m’accroche à ces instants précieux.
J’ai peur du moment où nous ne serons que quatre voire trois. Les premiers voyages sans les grands…
Evidemment, de plus en plus souvent, nous sommes en comité restreint. Nous ne les obligeons plus à venir en week-end avec nous. D’ailleurs, le premier week-end à trois, l’année dernière à Guéthary, j’ai été assez malheureuse. J’ai essayé d’en profiter mais j’avais le cœur lourd, je me sentais tronquée. Numéro 3 aussi ressentait le manque. Nos photos me semblent bien peu remplies. Mais je sais que je dois m’y faire.
Tic-tac… l’horloge accélère le rythme. Je ne sais pas s’il nous reste 2 mois ensemble ou plus. Alors, je vais tacher de profiter de chaque seconde de ma famille au complet. Je m’accroche…