Tu peux pas comprendre!
L’adolescence. Vaste sujet. Trouble sujet. Troubles sujets.
C’était hier pour nous, c’est aujourd’hui pour nos enfants. On sait. On entend et on lit. On constate aussi. Mais comprend-on ?
Je me souviens de cette copine de collège qui disait tout le temps « tu peux pas comprendre ». Enfin, elle le geignait plutôt. Tout était toujours pire pour elle que pour nous. Nous étions pourtant nous aussi des adolescents que personne ne comprenait !
Car c’est bien le propre de cette période de croire que tout est particulier et que nul ne comprend. Ils s’enferment dans le tourbillon de leurs sentiments exacerbés et manquent de recul pour réaliser qu’en fait, ce qu’ils vivent est des plus normal.
N’empêche que c’est ainsi. L’adolescent est un pionnier qui traverse des zones dangereuses seul. Il doit affronter les pires dangers, les plus terribles événements que nul autre avant lui n’a connu. On peut même dire qu’il exagère un peu. Juste un peu. Mais lui, il ne le sait pas. Il ne le reconnait pas en tout cas. Il est embourbé dans sa certitude. Seul au monde.
Sur une discussion avec numéro 2, 14 ans, (euh non, une engueulade en vérité. J’avoue), au cours de laquelle je lui fais remarquer qu’il ne travaille pas assez, celui-ci me répond : « Mais toi tu étais bonne en classe. Tu peux pas comprendre !! »
Je suis la méchante maman qui ne comprend pas son rejeton. C’était facile pour moi ! C’est difficile pour lui ! Ah mais non. Je ne suis pas d’accord. Je lui rappelle donc que moi, je travaillais. Je faisais mes devoirs (et en autonomie s’il vous plait) et je notais tout ce que les professeurs disaient. Et bla bla bla.
Vous vous en doutez, mes paroles ont glissé sur lui comme des skis sur une piste noire (c’est de saison). N’empêche que je n’aime pas quand il est de mauvaise foi. Et pour retourner la situation, j’essaie de lui faire dire les choses par lui-même. Je l’interroge donc.
Questions fermées : « Je suis pas toujours la première à te défendre ? Tu trouves qu’on a eu tord de te mettre en internat ? » J’ai la chance d’avoir un fils qui n’est pas trop menteur et qui (mais ça n’a pas toujours été le cas) reconnait certaines vérités.
Questions ouvertes (encore plus efficaces à la condition que l’ado joue le jeu et réponde à peu près honnêtement) : « Tu as vu tes notes. Qu’en dis-tu ? A ton avis, pourquoi papa et moi avons fait ceci ? Cela ? »
Et puis, à d’autres moments, je me souviens juste que c’est un adolescent. Que je l’ai été aussi. Que c’est une période bien particulière. Un tsunami. Et qui peut comprendre ce que ressent celui qui est pris dans ce cataclysme ?
C’est alors le moment de lui dire que, oui, c’est difficile pour lui. On lui en demande beaucoup malgré son jeune âge et en même temps, on ne lui accorde pas autant qu’il voudrait. Et parfois, simplement l’écouter, entendre son mal-être et lui proposer une aide, une réflexion, une oreille…
Amener son enfant, et qui plus est son adolescent, à reconnaitre certaines vérités d’une part et, surtout, essayer d’aller vers lui, de lui montrer qu’on l’a entendu et qu’on le comprend même un peu, permet de se rapprocher les uns des autres. Chacun fait un petit bout de chemin pour qu’on puisse tous mieux se comprendre. Et ça fonctionne !
Ce n’est pas magique non plus et ces moments de grâce n’empêcheront pas votre ado de continuer à penser et à dire que personne ne peut le comprendre. Parce que c’est un peu le cycle éternel. L’histoire de la vie… d’ado. Et puis un jour, l’enfant brise le cercle et entre dans un nouveau : celui du monde des adultes. Et un jour il sera parent (peut-être… j’espère) et on pourra observer à nouveau le cycle, et la boucle sera bouclée. Tu me comprends ?