Mon premier accouchement: acte 1
Les accouchements, ce sont les récits de guerre des femmes. Ceux où elles peuvent en rajouter encore et encore, avec de l’hémoglobine et des cris, de la sueur et des douleurs physiques. La bataille dont on sort mi-conquérante mi-vaincue. Et quand on a traversé une telle épreuve, on aime bien la raconter avec force détails.
Mais attention, un accouchement ce n’est pas juste 3 poussées et la délivrance. Non. Il y a l’avant, le pendant et l’après. Il y a les choses indicibles, celles qui ne se disent pas dans l’intérêt de la préservation de l’espèce humaine. Celles qui gênent les uns ou les autres ou qui dégoutent. Politiquement incorrectes ou tout simplement pas glamour.
Vendredi soir. Des contractions s’invitent. Mon ventre durcit, me fait souffrir puis se relâche. Supportable. Je souffle et je surveille la montre. 10 à 20 minutes entre deux, pas de panique. Je me couche. Je tourne, je vire, je cogite. Et si ? Mais non, ce n’est pas l’heure. Le terme est prévu dans une semaine. Keep cool.
Samedi matin. Après une nuit presque blanche, à peine entrecoupée de micro-siestes, je me lève dans le doute. Les contractions continuent mais espacées. Pas question de me précipiter à la clinique. J’ai trop entendu de récits de femmes qui se sont fait débouter. Je patiente. Je souffle. Je profite des sursis.
Samedi après-midi, elles s’installent. Un peu plus rapprochées mais pas de quoi supposer que la petite est en route. Je supporte mais je fatigue. Chéri monte une armoire dans la chambre (ok, on s’en fout, ça rajoute pas de suspens mais je m’en souviens comme si c’était… il y a 15 ans). Je le regarde, allongée sur le lit comme un phoque prenant le soleil. Ça tire, ça fait mal. Je serre les dents. Je veux une pause !!!!!!
Samedi soir, status quo. Les contractions prennent leurs aises. Ca s’en va et ça revient… mais ça revient surtout. Aïe. J’appréhende déjà la nuit. Mais je tiens bon. Je refuse de me rendre à la maternité pour m’entendre dire de rentrer chez moi et de prendre un bain. Alors je résiste, prouvant que j’existe : j’ai mal donc je suis. Et une deuxième nuit sans vraiment dormir.
Dimanche. Je suis épuisée, naturellement, et je commence à me dire que, peut-être, mon petit gigot (« le gigot qui gigote ») est sur le point de sortir son nez. Suis-je prête ? J’ai bien du mal à y croire. Ça ne peut arriver !!!!!! Non !!!!! Si ? Oui, je sais qu’il faudra bien mais bon, je supporte encore alors on reste à la maison.
Dimanche après-midi, j’entame une toute petite promenade avec ma belle-mère. Je me plie de douleurs toutes les ? 10 ? minutes. Peut-être moins. Elle me dit qu’il serait peut-être temps d’y aller. Mais non. Je continue à marcher, je tiens mon ventre comme si ça pouvait soulager. Je souffle de plus en plus. J’ai mal.
Dimanche soir, avant 20 heures. J’admets qu’il va quand même falloir se rendre à la clinique. Les contractions se font plus violentes. Je doute toujours que le travail ait débuté mais je commence à avoir du mal à supporter. On convient de manger un morceau et de partir ensuite. Chéri est au téléphone pour rassurer ceux qui pensent le moment venu : « on mange un bout et on y va ». Il est tout sourire, je suis crispée mais souriante.
Et puis non. Je le regarde avec détresse, lui fais des grands gestes. Je capitule. J’arrive au bout. Je ne peux plus. Il comprend : c’est l’heure de partir !!!!!!! Maintenant. Now. Right now !!!!!
Après 48 heures de contractions et 2 nuits sans sommeil, nous nous rendons aux urgences de la maternité. J’ai du mal à avancer car je me plie à chaque instant en soufflant comme une locomotive. Le personnel médical me dirige vers une chambre : « ah oui, quand même ! Vous avez beaucoup de contractions ! ». Oui madame. Et j’ai mal !
On m’ausculte et je prie intérieurement. J’ai encore peur qu’on me renvoie chez moi avec un « c’est un faux travail. Allez prendre un bain ». Mais non. Il est 20h30 et on me dit « on vous garde ». Yes !!!!!!!!!
Y a plus qu’à !!!!