Saga : Mammographie -2
La donne a changé. Il n’était plus question de laisser passer le temps. J’ai pris rendez-vous pour la mammographie suivante 6 mois après. Presque tout pile. Impossible d’attendre plus longtemps, même quelques jours. Et impossible d’y aller trop tôt non plus : j’étais à la fois pressée et pas pressée. La date du 1er mars s’est gravée en moi.
J’ai naturellement fait ce qu’on le ne doit pas. J’ai fait des recherches sur internet. J’ai tapé les mots savants et j’ai essayé d’analyser. Au final, cela m’a permis de relativiser.
J’ai toutefois vécu le mois précédent dans le stress. Les questions revenaient. La peur s’installait. Et à la fois, je me raisonnais sans cesse…
Pour exorciser mon anxiété, j’ai écrit au fur et à mesure.
Journal d’une mammographiée
16 février :
Parfois je stresse, inconsciemment. Juste une réaction.
Quand je réfléchis posément, je me dis que, très certainement, tout va bien. Que c’est absurde de s’inquiéter. Mais le doute subsiste évidemment. Puis-je dire qu’il me tarde la prochaine mammographie de contrôle ?
Un mot, une date… et je ne peux m’empêcher d’y repenser. Je me tâte parfois sous la douche quand autrefois je n’y pensais pas.
Lorsque je suis fatiguée, je me pose la question : mon corps se bat-il déjà ?
22 février
Je compte les jours… plus que 7. Une semaine et je serai rassurée.
Je suis fatiguée. Peut-être pas plus que d’habitude mais je m’interroge. Mon corps est-il déjà en train de lutter ?
Plus certainement suis-je fatiguée parce que c’est l’hiver. Ou parce que je m’écoute ou pour toute autre raison que la maladie.
J’ai mal aux seins depuis quelques jours. C’est toujours le cas à un moment du moins. Mais la période me semble plus longue que d’habitude. Ou alors n’y prêté-je simplement pas attention en temps normal ?
Se poser mille questions… et attendre la réponse qui soulagera
J-6
Dès que mon esprit n’est pas occupé (heureusement, ce n’est pas souvent), mes pensées retournent systématiquement vers le prochain examen. Et encore, je m’empêche d’aller farfouiller sur internet pour regarder les symptômes. Fatigue, seins douloureux, cycles déréglés… font forcément partie de la liste mais ils ne veulent rien dire non plus.
J-5
Comme l’impression que la mort se rapproche. Je ne devrais pas dire ça, bien-sûr, car je suis épargnée. Personne n’est mort du Covid dans mon entourage, personne n’a reçu de bombe sur sa maison et mes parents n’ont pas fait d’accident vasculaire cérébral ou de cancer.
Mais ce soir, après 2 ans de Covid, quelques jours avant la mammographie de contrôle et alors que la Russie a déclaré la guerre à l’Ukraine et que la maman d’un proche vient de faire un AVC, je sens la mort roder.
Je suis dans le même état d’anxiété et de confusion que le 16 mars 2020. Ce jour où, dans les couloirs du boulot, des petits groupes se réunissaient. On murmurait, on s’inquiétait, on envisageait des plans d’urgence. Ce jour où nous étions en état de crise. Ce jour où j’ai eu si peur d’être loin de ma famille et où les larmes sont venues accompagner ce stress.
J-3
J’ouvre mes mails au petit matin. Un rappel : n’oubliez pas votre rendez-vous. Je n’oublie pas… j’y pense. J’ai hâte même.
Je n’arrête pas de me dire que c’est forcément rien. Et puis que si c’était forcément rien, il n’y aurait pas besoin de contrôle, il n’y aurait pas de doute dans les yeux des médecins.
Je ne sais pas si je dois me persuader qu’il n’y a rien (le plus probable au vu des chiffres) ou me préparer.
Sur la plaquette qui parle du cancer et que j’ai relue en entier, il est indiqué que seulement 90 femmes sur 1000 ont une mammographie qui révèle un doute. Je fais partie de ces 9%.
Puis 7 femmes sur ces 90 seulement sont atteintes de cancer. Ferai-je partie de ces presque 8% des 9% ?
Et même si je fais partie de ce petit nombre, je sais que la prise en compte se fait tellement tôt que le traitement serait plus léger et certainement très efficace.
J-2
Je suis réveillée par un message qui me demande de confirmer ou annuler mon rendez-vous. Mais je suis plus sereine aujourd’hui. Au cours d’une discussion, on m’a demandé si je n’avais pas d’épisodes de fatigue depuis que j’avais eu le Covid début janvier. Peut-être que la fatigue que je ressens depuis quelques temps vient finalement de là ?
J-1
Je me sens moins inquiète mais les choses ne seront de toute façon pas satisfaisantes demain.
S’il faut faire une biopsie, je serai inquiète mais potentiellement définitivement rassurée après le résultat. Si les médecins ne proposent pas de biopsie, j’aurai toujours le doute. Et ce doute ne pourra être levé qu’à un prochain contrôle !