Saga : Mammographie -3
C’est le jour J.
7 heures. Les oiseaux chantent. Sera-ce une belle journée ? Je suis attentive à tout mon environnement. Je suis « aware ». Je veux tout ressentir.
Je suis plutôt confiante. Je me dis qu’il n’y aura rien de grave. Peut-être même plus rien du tout ? Je vais faire partie de la grande majorité qui va bien. Je suis dans la masse, dans la norme. Je m’efface dans le nombre.
Je me rends au travail, l’esprit ailleurs. Je suis pressée d’y être. D’en finir. L’attente est un supplice.
Puis je m’absente pour le centre d’imagerie…
Je connais désormais le chemin, les locaux. Je me présente à l’accueil, entre anxiété et confiance. Toujours partagée entre l’idée qu’il ne faut pas paniquer car toutes les chances sont de mon côté et celle de ne pas nier le possible. Ne pas s’alarmer et ne pas se leurrer.
Je me le suis raconté tellement de fois dans ma tête. Je me suis fait des conversations en défendant les deux points de vue. Je me suis trouvée bête d’imaginer le pire et je me suis trouvée naïve de ne pas l’envisager.
Les examens s’enchainent rapidement. La mammographie est douloureuse. Je serre fort les poignées, me concentre sur ma respiration. En quelques minutes, c’est plié. L’échographie suit et le médecin m’annonce immédiatement que tout va bien. Il n’y a pas d’évolution. Les 6 mois écoulés n’ont pas eu d’effet.
Je suis soulagée, naturellement. La menace s’éloigne. Les images s’estompent.
Ce n’est toutefois pas encore derrière moi car il reste une mammographie de contrôle à faire 6 mois plus tard. La dernière je suppose.
Depuis, je me tâte les seins, je vérifie mes aréoles… pas tout le temps mais régulièrement. Ce n’est plus juste une maladie, c’est désormais une possibilité, un risque, un doute. Je me suis imaginée malade avec la peur au ventre. Je me suis sentie concernée, physiquement.
Je me sais chanceuse d’être en pleine santé. J’en ai toujours eu conscience mais de loin. Aujourd’hui, je le ressens plus fort.
Mais la confiance aveugle en la vie est rompue. Et ça ne se répare pas complètement. Le spectre de la maladie rôde. J’y pense parce qu’il faut que je fixe ce prochain rendez-vous.
J’ai voulu le faire rapidement mais c’était trop tôt. Alors j’attends. Puis je pourrai le prendre et j’attendrai la date. Puis je serai certainement rassurée par les nouveaux résultats mais j’attendrai la prochaine échéance. Du moins, j’imagine que ce léger doute restera dans un coin de ma tête. Il y a pris place et rien ne pourra l’en déloger. Il se fera sûrement plus petit au fil du temps jusqu’à la prochaine mammographie. Il se nourrira de mes angoisses pour reprendre consistance et je m’efforcerai de le diminuer à nouveau.
Un doute peut acquitter mais il ne quitte jamais vraiment. Il est une mauvaise graine qui cherche à germer. A moi de ne pas l’entretenir…