Amour de jeunesse -6

Publié le par Raphaëlle

Septembre 1998

Il est temps de conclure cette saga. L’amour de jeunesse prend de la maturité. Nous passons un cap. Nous sommes cependant encore jeunes, n’avons pas d’emploi ni de foyer à nous.

Chéri est au lycée de la mer pour terminer son cursus dans la maintenance navale. Et moi, je rentre en troisième année de fac. Je réussis à m’inscrire à Talence, j’obtiens une chambre étudiant et l’argent de mes boulots d’été ajouté à celui que mes parents me versent me permet de vivre. De vivoter plutôt mais peu m’importe puisque chaque week-end, je le passe avec lui.

Quand j’y repense, nous vivions déjà un peu comme aujourd’hui ; loin l’un de l’autre la semaine et ensemble le week-end.

Nous recommençons une deuxième année sur le même schéma. Il commence à travailler et je vis à Mont de Marsan pour mes études. Bien installée grâce à ma belle-maman qui m’a accompagnée dans les démarches et m’a offert mes premières courses, je profite d’un studio de 30 m² moins hermétique qu’un débardeur en résille à Ouessant un soir d’automne. Le radiateur grille-pain installé sous la fenêtre aérée consomme trop pour ma petite bourse. Je passe donc l’hiver emmitouflée dans mon pyjama et mon peignoir, sous la couette avec une couverture et recroquevillée sur moi-même. Heureusement, chéri me rejoint un week-end sur deux pour me gratifier de sa chaleur tandis que l’autre week-end, je le rejoins chez ses parents.

Nous apprécions nos moments en autonomie, comme des adultes que nous devenons. Et nous nous projetons sur l’année suivante, convaincus que nous ne pouvons que vivre ensemble, quels que seront les obstacles.

Notre relation, notre amour sont ainsi faits : ils bravent les adversités et les pronostics. Nous poursuivons notre chemin, sans douter.

 

Septembre 2000

J’ai terminé mes études mais je n’ai pas atteint mes objectifs. Lui, il travaille. Il a un petit salaire d’ouvrier et un peu d’argent de côté. Moi, j’ai du courage et de la volonté.

Je travaille l’été à l’hôpital mais de Bordeaux cette fois quand nous emménageons dans notre premier appartement commun. Un 3 pièces avec petit balcon. Un luxe incroyable ! A petit prix. Il faut dire que nous partageons presque l’intimité du voisinage. Nous entendons notre jeune voisine tirer la chasse d’eau. Nous participons aux disputes du couple voisin et profitons des coups au plafond que la vieille voisine donne pour répondre au tapage des derniers.

Pour des raisons économiques (manger, payer le loyer et financer les apéros que ne manquent pas de venir prendre nos amis), j’intègre la Police Nationale en tant qu’emploi jeune.

Notre amour de jeunesse devient une vie de couple tout ce qui a de plus conventionnelle. Et pour la première fois, nous nous voyons tous les jours. Le bonheur !!!

 

Non, tu n’y crois pas quand même ? Le bonheur… il faut le construire. Il ne tombe pas tout cuit dans nos petits becs d’oisillons sortis du nid. Il faut le bâtir, pierre après pierre. Et nous découvrons tout à coup que nos fondations ne sont peut-être pas assez solides. La construction est fragile.

David aime voir ses amis, sortir, prendre l’apéro… vivre comme il l’a toujours fait dans son adolescence.

Je suis plus demandeuse de sa présence. Perdue, sans autre attache que lui, je l’étouffe.

Notre couple vacille pour la première fois, confronté à la réalité dans toute son imperfection. Il râle, je pleure. Il ne me comprend pas et je lui fais des reproches.

Notre amour, lui, est toujours aussi fort. Il a survécu à la distance, à l’adolescence, aux influences… Je ne doute pas qu’il puisse survivre. Je ne me pose même pas la question.

 

Et un jour… Après avoir quitté son travail d’ouvrier qui ne le satisfaisait pas et avoir répondu à des missions d’intérim en tous genres, on lui propose un emploi de responsable d’équipe à Toulouse. Il y voit une porte de sortie, une alternative. J’y vois un abandon. Et pourtant…

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